Fragments d'un discours architectural
Lucrezia Guadagno
Club ASAP 06
mars 2025
Temps de lecture : 5 min
Le livre de Roland Barthes, Fragments d'un discours amoureux, publié en 1977, est présenté sous une forme non traditionnelle. Sa structure reflète le contenu lui-même, qui explore l'amour comme un langage fragmenté et complexe, fait d'images, de sensations et de perceptions qui ne peuvent pas être facilement résumées dans un discours linéaire. Le texte est composé d'une série de courts fragments qui explorent chacun un aspect différent de l'expérience amoureuse. Les fragments ne suivent pas une narration ou une intrigue traditionnelle, mais se succèdent comme des pensées ou des images discontinues. Chaque fragment est autonome, mais ensemble, ils contribuent à une image complexe de l'amour.
Je considère ici la forme et la structure du livre de Roland Barthes pour parler plutôt d'architecture, de ses fragments, de ses mots. Je crois ainsi qu'il est possible de traiter les différents aspects de l'architecture de manière plus libre et plus réfléchie, sans ordre rigide, mais plutôt comme une série de pensées, d'impressions et d'intuitions alternées. Des mots qui peuvent sembler fondamentalement différents et éloignés mais qui, en fait,s'influencent continuellement les uns les autres.
Cinq mots pour une minute.

Langage :
Nous vivons dans un contexte où le rapport à la réalité est souvent fragmentaire, nous assistons continuellement à une exaspération du langage qui, dans certains cas, s’interpose sur le présent, le rendant opaque. Je me demande donc quel rapport entretenir avec lui, étant donné qu’il représente un outil fondamental pour raconter la réalité et la faire exister. Le présent est en constante évolution, et pour décrire les changements et comprendre son propre temps, il est nécessaire d’actualiser le langage ; en effet, de nombreux mots changent de signification, de valeur, de sens. ces aspects affectent également l’architecture ; en fait, nous avons été et sommes témoins de différentes approches du langage, allant des choix matériels aux positions idéologiques.
Mais comment se situer par rapport au langage existant? qu’en tirer et comment l’utiliser pour véhiculer de nouvelles valeurs et positions? et comment confier son architecture au langage?

Mémoire :
La mémoire est la capacité de stocker, de récupérer et de rappeler des informations, des expériences et des connaissances acquises au fil du temps. c’est un processus qui nous permet de conserver des traces du passé dans notre esprit, à la fois individuellement et collectivement, et qui joue un rôle crucial dans notre identité, notre perception du monde et notre comportement quotidien. la mémoire est une activité dynamique et sélective qui retravaille les expériences et les informations au fil du temps, c’est pourquoi elle diffère de l’histoire.
Par conséquent, comment nous situons-nous par rapport au tissu existant des villes, et par rapport à l’architecture du passé, comment nous insérons-nous dans des contextes stratifiés et denses, en tenant compte des questions contemporaines?

Image :
l’utilisation de l’image, sa reproductibilité et sa diffusion dans le monde d’aujourd’hui est une question qui ouvre une large dimension. Une question qui interroge l’usage que nous faisons de l’image pour décrire notre travail. La distance nécessaire pour aborder cette question est assez limité, car l’usage de l’image est relativement récent et en constante évolution. C’est pourquoi il est important de s’interroger sur le rôle de l’image aujourd’hui dans la description des visions du futur, dans la narration et le remaniement de la réalité.

Réalité :
Si nous considérons la réalité comme l’ensemble complexe des choses qui se produisent, qui ont une composante numérique et personnelle, l’architecture peut-elle être un dispositif capable de répondre aux différentes questions qui composent le présent?
Quelle relation établir avec les différents thèmes qui composent le contemporain, qu’ils soient politiques, sociaux, économiques, environnementaux? comment regarder la réalité lorsque l’architecture permet de transformer, directement ou indirectement, l’espace qui nous entoure?

Communauté :
Il est important de s’interroger sur la relation entre la communauté et l’espace bâti, et de comprendre comment l’architecture est responsable à cet égard. En fait, l’architecture est une composante matérielle et immatérielle de la vie d’une communauté, c’est un arrière-plan mais aussi une matrice active d’espaces. La façon dont nous vivons et interagissons avec l’espace urbain n’est pas seulement déterminée par les bâtiments et les structures physiques, mais aussi par le comportement et les actions des personnes qui habitent ces espaces.
Par conséquent, la ville devient une scène et est communiquée non seulement par les formes de l’architecture, mais aussi par tout ce que les êtres humains ajoutent dans leur appropriation de l’espace. il convient donc de réfléchir à ce qu’est le droit à la ville et au rôle de l’architecture dans la définition des manières d’être ensemble.

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# | Titre | Auteur | |
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600 | To Build an Element | ASAP | Club #06 |
601 | L'Utopie se matérialise-t-elle ? | Salma Bensalem | Club #06 |
602 | Fragments d'un discours architectural | Lucrezia Guadagno | Club #06 |
603 | Du renouvellement de la Description | Bastien Ung | Club #06 |
604 | Le Diagramme entre Contrôle et Fuite | Louis Fiolleau | Club #06 |
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