Le temple de la physicalité
Louis Fiolleau
Exposition au Blockhaus DY10
novembre 2022
Aujourd’hui, c’est l’office dans tous les temples de la physicalité. Cela fait six mois que j’attends, depuis la dernière cérémonie. J’ai hâte de repénétrer dans la cour triangulaire centrale, celle qui est normalement close et invisible à tous.
Une fois dedans, moi et tous les fidèles de la paroisse pourrons entrer dans les trois corps de fabrique,
désertés aujourd’hui par leurs opérateurs habituels.
Devant nous, s’étaleront les machines, les tapis roulants, les crochets suspendus, figés pour
nous laisser l’occasion de réellement les percevoir. On pourra les toucher, les sous-peser, sentir leur
chaleur, leur matérialité... bref s’émerveiller de leur présence physique.
Désormais, au repos, sans injonction productive, le réseau global qui nous nourrit, nous chauffe et nous permet de communiquer affirme sa localité. Je toucherai du doigt (littéralement) l’origine du steak que j’ai acheté hier, de l’électricité avec laquelle je me suis éclairé, ou du réseau téléphonique que j’utilise inconsciemment à chaque instant.
Il y a encore dix ans, tous ces points d’ancrage du réseau nous étaient cachés, loin des centres habités, dans leurs propres territoires déconnectés de celui de la population. Puis les temples ont commencé à apparaître un peu partout. S’installant là où il y avait de la place et surtout là où il y avait des gens. Ils se sont glissés devant nos portes, déployant leurs triangles de production dans nos dents creuses, sur les places de nos villages...
Le temple n’ayant pas de dimension prédéfinie, certaines paroisses ont décidé d’englober l’entièreté de leur ville dans le triangle. D’autres individus, qui ont fui la ville suite aux dérives du siècle, ont installé leur propre temple personnel loin de la civilisation.
Mais tous, peu importe leur géométrie et leur situation, sont reliés ensemble par le réseau de redistribution d’une part, mais surtout par ce rite commun bis-annuel : au solstice, la production globale et gazéifiée s’arrête pour que tous se saisissent de la physicalité bien incarnée de ce que l’on mange, ce qui nous chauffe et ce qui nous permet de parler
L'ensemble des articles issus de l'exposition sont disponibles ci-dessous:
# | Titre | Auteur | |
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001 | Exposition #01 Tuez vos Pères | ASAP | Tuez vos pères |
002 | Le charme discret de l'aire résidentielle | Hugo Forté | Tuez vos pères |
003 | Architecture Non Non Référentielle | Sacha Nicolas & Basile Sordet |
Tuez vos pères |
004 | Le paysage d'après Mendeleïev | Clarisse Protat | Tuez vos pères |
005 | Mes chers chez moi | Rachel Rouzaud | Tuez vos pères |
006 | Briser le plan | Thimoté Lacroix | Tuez vos pères |
007 | Vertu et fruits confus | Louis Voyer | Tuez vos pères |
008 | Au delà de la Bigness & l'Emptiness | Louis Fiolleau | Tuez vos pères |
009 | Fear and Learning from Las Vegas | Hugo Forté | Carte Blanche |
010 | Le temple de la physicalité | Louis Fiolleau | Carte Blanche |
011 | Situez vos pères | ensa Nantes Studio MHP |
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